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Intervention: « Faut-il euthanasier les archives ? : tension entre mémoire et oubli dans la société française contemporaine »

par Marie Ranquet et Aude Roelly

Au sein de la séance « Consulter, communiquer, diffuser les archives numériques : enjeux et interrogations« , vendredi 1er avril 2016 de 9h à 12h, présidée par Nicolas Dohrmann.

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L’individualisation de la mémoire entraîne une revendication forte de droit à l’oubli qui s’oppose au devoir de mémoire. Dans ce cadre, le rôle de l’archiviste est à réinterroger. Doit-on tout conserver pour l’histoire ? Toute décision n’est-elle pas soumise à des contraintes juridiques (le projet de règlement européen sur la protection des données à caractère personnel), technologiques (les formats propriétaires), voire sociétales (lobbying de tel ou tel groupe pour valoriser un pan de l’histoire ou au contraire l’effacer) ?

La démarche de la commémoration, qui porte sur ce qui a été retenu au titre de la sélection, est un choix conscient de ce que la société souhaite garder en mémoire. On constate une volonté de plus en plus forte pour chaque individu de déterminer le jour sous lequel il apparaît, qui va jusqu’à la tentation de réécrire les faits. Les archivistes sont confrontés à des demandes d’effacement d’un passé jugé indésirable, au risque de la remise en cause l’authenticité des sources. Quand les données à caractère personnel sont de plus en plus perçues comme des données personnelles, celui qui a des droits sur l’information se pense fondé à décider du sort de celle-ci, notamment dans le cas du numérique.

Devoir de mémoire et droit à l’oubli semblent donc en opposition frontale mais leur réconciliation est un enjeu majeur de cohésion de la société. Cette réconciliation passe notamment par la possibilité pour chacun d’accéder aux sources conservées. Les délais de communicabilité permettent une désensibilisation de l’information : c’est la « fabrique de l’histoire » qui fait passer l’information du statut d’actualité au statut de source historique, avec le recul intellectuel que cela suppose.

 

Intervenantes
Marie Ranquet

Conservateur du patrimoine, chargée de la communicabilité des archives publiques au sein du bureau de l’accès aux archives, au Service interministériel des Archives de France (SIAF) depuis juillet 2011, doctorante à l’École des chartes sur « Le droit d’accès aux archives publiques depuis 1979 ».

 

Aude Roelly

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