Les archives hospitalières sont des dossiers sensibles et difficiles à traiter car elles mêlent à la fois archives publiques, archives privées et archives administratives, archives médicales.
La première communication était présentée par Claudine Bellamy et Anne-Pascale Saliou sur le thème de la spécificité des archives en établissement psychiatrique. Dans ce milieu professionnel, les archivistes professionnels ne sont pas majoritaires ; la fonction est souvent assumée par des volontaires, des gens formés sur le tas ou des fonctionnaires issus du domaine médical. Dans un premier temps, les fonds ont été confiés à des sociétés savantes et des associations passionnées. La procédure d’accréditation a permis le retour des archives dans un service dédié. Les archives psychiatriques présentent des particularités. Tout d’abord, leur classement dépend des modalités de prise en charge du patient ( selon laquelle il a été placé volontairement ou d’office dans l’établissement). Il y a également une prolifération des documents administratifs spécifiques : « livre de la loi » (« Mémoire des hôpitaux ») devant être conservé indéfiniment, dossiers administratifs du patient et rapports. Depuis les années 1990, les droits du patient vis-à-vis de son dossier ont été sans cesse renforcés par le cadre législatif et réglementaire. Le dossier patient est au cœur des débats et donc au cœur des communications. Dossier se voulant unique, son versement s’effectue cinq mois après la sortie du patient et son délai de conservation fait l’objet d’interrogations. Les fonds font l’objet d’une ouverture réglementée au public, par la loi du 4 mars 2002 puis 2008. Ces fonds intéressent particulièrement les chercheurs, les généalogistes, les médecins, les historiens et les patients. Comme tous les services d’archives, les archivistes des établissements psychiatriques tentent de s’orienter vers la mise en valeur culturelle de leurs archives (historiques). Il y a différents objectifs :
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fidéliser le personnel
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faire changer le regard sur la maladie mentale jugée honteuse et parvenir à « une dé-stigmatisation »
Cette politique culturelle est largement contestée par le milieu médical, partisan du secret médical et du droit à l’oubli.
Stéphan Mazzocout nous a présenté le groupement d’intérêt public ASCODOCPSY. Ce réseau documentaire en santé mentale regroupe 90 établissements de santé mentale, 110 centres de documentation et 35 centres d’archives. Les cinq objectifs principaux sont : mettre en commun des fonds documentaires, faire évoluer le statut des archivistes et des documentalistes, publier la littérature dans le domaine, co-adhérer avec les établissements francophones et valoriser la place des services d’archives dans les établissements de santé. Le comité technique valide les propositions des douze commissions dont la commission d’archives hospitalières. En 1990, seuls deux établissements avaient un service d’archives intégré contre 35 aujourd’hui. Cette commission a fait de nombreuses réalisations tel que le guide des archives hospitalières, une liste de diffusion, une lettre de veille Archimède, des formations, des enquêtes, des journées d’étude. Elle a de nombreux partenaires et elle reste ouverte à de nouvelles propositions pour faire avancer la législation sur les archives hospitalières et sensibiliser à l’archivage électronique.
La communication d’Anne-Marie Bailloux et de Lydiane Gueit-Montchal a posé une compilation de problématiques actuelles relatives au dossier-patient et aux archives hospitalières. Elles sont revenues sur le problème du statut face à la dématérialisation où le dossier-patient doit faire face à différents problèmes : de contenu, de format et supports, d’imagerie et de sélection pour la conservation. A l’avenir, la « gestion multi-sources » du dossier-patient compliquera la tâche de l’archiviste et du personnel médical. Il engendre également des problèmes de volume, de stockage et d’externalisation. Il faut également réfléchir à la pertinence de l’information (pour la conservation). La sélection ne peut pas se faire sans l’aide du corps médical. Il faut réfléchir au dossier en terme de pérennisation des données, de confidentialité et d’accessibilité.
La conclusion et les débats ont soulevé plusieurs remarques. En comparant les coûts et les apports de la dématérialisation, se pose la question de son utilité en milieu hospitalier. Il est apparu nécessaire de penser une législation pour ce type de service qui permettra de mieux encadrer et homogénéiser la pratique. Ces trois communications ont mis en exergue l’actualité du débat autour du droit à l’oubli vis-à-vis du secret médical, de la déontologie, et du métier d’archiviste. En ce sens, la commission qui vient de se créer pour les archives hospitalières au sein de l’AAF devrait permettre de faire remonter les propositions et les réflexions.
Clémentine Dumas, Marine Vautier et Aurélie Coulon.